12Jul

Destiné à soutenir les jeunes talents RH, le Prix Humanys récompense le meilleur mémoire rédigé dans le cadre du Master of Advanced Studies en management, ressources humaines et carrières (MAS MRHC). Le dernier en date salue le travail de Valérie Kummer, qui a interrogé les notions d’innovation et de créativité à travers le prisme de leurs pratiques et représentations au sein d’un panel d’entreprises technologiques vaudoises. Avec à la clé des conclusions étonnantes et plusieurs propositions.

Valérie Kummer, vous avez remporté le Prix Humanys 2021, toutes nos félicitations! Comment résumeriez-vous la problématique de votre mémoire de fin d’études intitulé Innovation et créativité: représentations et pratiques des entreprises technologiques dans le canton de Vaud?

La question qui a guidé ma recherche était de savoir comment les entreprises qui se disent à la pointe de l’innovation s’y prennent pour favoriser à l’interne une culture créative et innovante. J’ai organisé mon travail autour de l’abondante littérature dévolue à la question, ainsi que de onze entretiens que j’ai menés avec des opérateurs vaudois actifs dans les nouvelles technologies. Ces entreprises étaient toutes des scale-up, c’est-à-dire des structures ayant dépassé le stade de la start-up, et caractérisées par leur transformation rapide à plusieurs niveaux (internationalisation, recrutement, développement des partenariats commerciaux, techniques ou financiers, etc.).

Pourquoi avoir choisi de vous intéresser à ce sujet?

Pour deux raisons principales. Tout d’abord, j’avais eu l’occasion de mener un premier travail de recherche détaillant la manière dont les notions de créativité et chaos influencent la phase de structuration d’une start-up. Ensuite, la quête de l’innovation représentant l’un des enjeux actuels majeurs pour toute société, j’ai souhaité approfondir la question en l’abordant sous un angle jusqu’alors peu souvent traité par la recherche.

Quels sont les principaux enseignements de votre travail?

S’il fallait n’en retenir qu’un seul, je dirais qu’il prend la forme d’un constat assez paradoxal: les entreprises innovantes ne sont pas toujours innovantes en termes de processus favorisant l’innovation. Cela s’explique d’une part par le fait que leur créativité se concentre généralement sur les produits qu’elles lancent avec succès sur le marché, et, d’autre part, par l’essor rapide en termes de personnel qui caractérise les scale-up (environ 20% de nouveaux collaborateurs chaque année). Dans ces conditions, la mise en place d’un cadre stimulant la créativité n’est donc pas aisé.

Comment cela se traduit-il sur le terrain?

La plupart des gens avec qui je me suis entretenue avaient relativement peu de recul sur leurs pratiques. Pour favoriser l’innovation à l’interne, chacun a ses techniques et ces dernières sont employées non pas en fonction de leur efficacité intrinsèque, mais plutôt parce que les personnes ont l’habitude d’y recourir, sans forcément les questionner.

C’est-à-dire?

Le brainstorming ou la Carte Mentale (Mind Mapping), deux techniques qui partagent un certain nombre de points communs, ont des avantages et des inconvénients: elles trouvent

rapidement des applications concrètes mais n’apportent rien de véritablement nouveau. A l’inverse, la technique de la Baguette Magique (Wishful Thinking) permet de sortir des sentiers battus mais exige plus de temps pour une application concrète. A chaque situation, en fonction de tout nouvel objectif, il faudrait donc en théorie adapter sa technique. Or, on se rend compte que ce n’est pas le cas, du moins au sein des scale-up sur lesquelles a porté ma recherche.

De manière générale, la créativité peut-elle être encouragée ou développée, ou alors s’agit-il d’une qualité innée?

On touche là une idée préconçue en vertu de laquelle beaucoup de gens sont convaincus que la créativité est une affaire de personnalité. En clair, on l’a en soi ou on ne l’a pas. Dans la dernière partie de mon travail, j’insiste toutefois sur le fait que la créativité peut être développée et soutenue par les entreprises afin de mettre en place un cadre susceptible de stimuler la créativité individuelle et collective.

De quelle manière?

Cela passe par un système de reconnaissance symbolique efficace, grâce auquel les collaborateurs évoluent dans un climat serein, où les initiatives et prises de risque sont récompensées. Par ailleurs, le management doit veiller à ce que les jeux de pouvoir à l’interne ne menacent pas la cohésion des équipes, sans laquelle il semble utopique de voir émerger innovation et créativité.

D’autres conseils?

Les scale-up doivent réfléchir en amont à la manière de poursuivre leurs activités après le départ du fondateur, ce qui signifie que le middle management doit faire l’objet d’une attention particulière, lui qui est parfois pénalisé en raison du rôle central que jouent les initiateurs d’une start-up. Au niveau des infrastructures, enfin, je préconise, parallèlement au modèle prédominant de l’open space, d’aménager des espaces que je décris dans mon mémoire comme «propices à la réflexion et à des postures contemplatives», et ce dans le but de faire coexister la création collective et individuelle.

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